Coup de foudre

Apnée subversive et lumière crue…

Il est trois heures du matin, je suis à moitié affalé sur mon bureau, un verre à moitié vide… Ou serait-ce à moitié plein ? Je me suis toujours demandé de quel côté de la barrière j’avais choisi de me situer. J’ose imaginer que si je fumais, ce cendrier qui n’est pas le mien accueillerait les cadavres gisant à la mort après des heures de travail. Mais je n’ai pas travaillé… Je me suis réveillé la nuit dernière, une insomnie, un faux plafond… Un mensonge ? Tout mon être a alors erré pour ensuite être titillé par le roman signé d’un nom qui ne m’était pas vraiment inconnu… « Cortisol Queen » de Arnaurd Arseni. Je l’ai dévoré…

La douleur… Ce mal-être répandu de nos jours sur le monde comme une peste apocalyptique. Ce quelque chose qui éveille en nous, en moi, un sentiment particulier… Étrange parfois. Un émoi qui, né de la curiosité d’avoir ouvert ce livre pour y poser les yeux et y trouver un refuge à l’ennui, un samedi sombre et triste en plein mois de juivembre, s’est finalement transformé en… Je ne sais quel mot choisir : exaltation ? Engouement ? Ensorcellement ?

On m’a toujours appris que lorsqu’on pose les mots sur une feuille, une fois l’encre sèche, on ne peut finalement évoquer l’idée- même de soumettre ces maux au regard des autres sans devoir commencer par accepter de s’en déposséder. Ainsi, lorsque l’autre aura lu, l’information digérée, il pourra ensuite interpréter avec ses propres critères et prêter à nos mots l’ombre des siens, influencé par son propre vécu. Toutefois, il y a quelque chose d’impudique dans ce livre… Un peu comme si ce garçon qui se sied tant à croquer dans la chair, ou plutôt laisser croquer dans la sienne, avait décidé un beau matin, au réveil, une tasse de café à la main, prêt à allumer sa première cigarette, qu’il allait nous conter, là ,une histoire qu’on ose deviner la sienne, totalement nu, face à nous. Est-ce là le besoin humain de s’identifier ou de pouvoir identifier ? Je ne sais pas… Pourtant, cette intensité qu’il prête aux mots, crue, intacte, acerbe, force au respect. Parce qu’on ne décide pas du jour au lendemain de lever ses manches pour contrer les cicatrices qu’un certain passé aura choisi de graver dans nos veines, comme on grave nos noms pour les immortaliser dans le temps. 

« Cortisol Queen » n’est pas un roman comme les autres… Qui a dit, d’ailleurs, qu’il s’agissait d’un roman ? Mais dans ce cas, quel mot, quel terme, quelle empreinte lui donner ? Celle d’une vie, d’un témoignage, d’un corps meurtri qu’on placerait là sous nos yeux, sans nous prévenir, histoire de nous montrer que le monde n’est qu’un mauvais film. Une sorte de journal intime, celui de Lou, qui nous conte sa vie en deux temps, celle d’un présent paumé, parti à la guerre sans armes ni vêtements, exposé en contre plan dans un clair obscur fait des nuances d’un passé torturé, où sont nées les plaies, l’angoisse, le mal-être, dans la cruauté d’un monde qui ne sait pas, qui ne voit pas, ni n’entend… Ou d’une réalité qui ne peut que lui appartenir à elle seule. Ainsi, sans vouloir trop spoiler, puisqu’il paraît que cela ne se fait pas, Lou retrouvera le chemin du passé suite au suicide de son meilleur ami, une âme qui le quittera pour la première fois depuis des années. Mais revenir au passé ne se fait pas sans douleur…

« Cortisol Queen » est un récit bouillonnant d’émotions très diverses, agrémentées de façon originale par une playlist lui collant parfaitement à la peau, toutes plus vives les unes que les autres. J’ai choisi, un peu par hasard, en pleine errance, d’ouvrir ce livre, sans même me douter que je ne le refermerais pas avant la nuit. Dévorant ses pages d’une seule bouffée… Le déposant ça et là, histoire d’appeler mon assistant afin qu’il reporte un rendez-vous l’après-midi, me permettant d’y revenir sans plus tarder. Ici, pas de masques, pas de faux-semblant, pas de compromis. Les choses sont écrites avec la véracité d’une réalité crue et abrupte d’humanité. On s’attache rapidement, on s’identifie, on a envie de prendre le héros meurtri dans les bras tantôt pour le rassurer, tantôt pour l’engueuler… Tantôt pour venir le rejoindre dans ses moments les plus torrides. Arnaud Arseni entreprend de nous dresser le portrait d’un homme gay, sans tomber dans la facilité à laquelle on nous a tant habitués, travestissant faussement les visages comme des moments de fêtes sans fins… Lui, montre la face cachée du décor, celle de la solitude, du rejet, de la douleur et de l’incompréhension. Des sentiments que toute personne « différente » est à un moment ou l’autre presque obligée de combattre. 

Cortisol Queen est le premier roman de l’auteur belge Arnaud Arseni

Les pages dévorées les unes après les autres, l’espace d’une journée, je me suis identifié à mon tour à ce personnage écorché vif… Dans ce mal-être profond qui peut habiter chacun de nous, si tant est qu’une enveloppe d’hyper-sensibilité lui colle à l’âme telle une deuxième peau. Parce qu’un regard n’est pas qu’un regard, parce qu’un sourire n’est pas qu’un sourire, parce qu’un éclat de rire n’est pas qu’un éclat de rire et qu’un couteau enfoncé dans le cœur n’est jamais sans incidence ! Au moment où j’ai terminé de lire ce livre, je l’ai fermé, laissant ma tête  basculer légèrement en arrière, ne sachant pas si je devais sourire ou pleurer. A l’heure où je pose ces mots sur mon écran, je suis partagé entre ce sentiment me mettant mal à l’aise d’avoir reconnu mes craintes, mes angoisses, mes doutes dans ces maux déposés sous mes yeux, et ce sentiment étrange d’avoir passé une journée à ne rien faire si ce n’est m’être nourri d’une humanité rare et belle jusque dans sa douleur.

Si « Cortisol Queen » est le premier roman écrit par ce jeune auteur qu’est Arnaud Arseni, il est à espérer qu’il n’est que le début remarquable d’une longue série de récits qui viendront titiller nos vies de ce petit plus dont il n’a absolument rien à envier aux grands. J’ai parfois tendance à me détester, lorsque je constate avec effroi que je me réfugie trop souvent dans des choix d’auteurs classiques, histoire de ne rien perdre de mon petit confort sécuritaire. Pour l’occasion, la claque littéraire que je viens de me ramasser dans la gueule me rend heureux ! Cet article n’était pas prévu… J’en suis d’autant plus fier de bousculer mon agenda, pour vous en parler aujourd’hui, concluant d’un « Allez lire ce putain de livre… Il ne peut en aucun cas laisser indifférent » !

Scylla…
LIENS :

CORTISOL QUEEN

Auteur :  Arnaud Arseni

Publié par : Mix Éditions

Nombre de pages : 204

Formats : Broché et Ebook

N° ISBN Papier : 978-2-37521-178-6

N° ISBN Numérique : 978-2-37521-179-3

© Mix Éditions 2021, tous droits réservés.

© Mix Éditions, pour la présente couverture.

Suivi éditorial et correction : Natacha Rousseau

Dépot légal : Janvier 2021

Date de parution : Janvier 2021

Mix Éditions

200 Route de Bordeaux

40190 Villeneuve de Marsan

Website : www.mix-editions.fr

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