Coup d'œil

D’insecte, maintenant dit : Je suis autrefois…

Ce 22 juin faisait battre le cœur de Nanterre et de la superbe salle de la Défense Arena au rythme d’un son typique à un battement de cœur… Celui de Mylène Farmer, qui montait sur scène, après six ans d’absence, histoire de rencontrer une dernière fois son public, pour cette résidence de neufs dates, qui signe son septième spectacle. Après avoir décidé de ne pas y aller, à l’annonce de la résidence unique sur Paris, puis une longue hésitation lors de la première, j’ai finalement assisté à la dernière de ces dates. Moment inoubliable…

Mylène Farmer, ou plutôt ses mots, sa musique, ses émotions, son personnage, m’accompagnent depuis ma plus tendre enfance, alors même que ma classe réalisait une chorégraphie, lors du spectacle de fin d’année de l’école, se déroulait sur le son de « Pourvu qu’elles soient douces », chanson dont les paroles évoquent le thème de… la sodomie ! Et oui… S’il est vrai que ses mots ne m’ont plus jamais quittés depuis, j’ai eu le plaisir d’assister à plusieurs de ses spectacles, dans différentes villes, notamment Paris, que j’avais trouvé très froid dans son ambiance, lors du Mylènium Tour. Je m’étais donc juré de ne plus refaire de dates sur cette ville… Le pourquoi de ma déception, il y a quelques mois, lors de l’annonce d’un nouveau spectacle, intransportable, de neufs dates. Une résidence donc, sur la salle de Nanterre, qui, il faut l’avouer, est une salle immense (elle peut accueillir jusque 27.000 spectateurs).

Une scénographie impressionnante pour cette résidence de neuf dates.

Mais bon… Ce n’est pas parce qu’on ne se déplace pas, qu’on n’est pas attentif. Ayant particulièrement adoré son dernier opus « Désobéissance », réalisé sous la production, entre autre, de Feder, l’actualité de la chanteuse française ne m’avait pas échappé. Et comme tout « fan », j’étais impatient de voir ce que l’artiste avait préparé pour ce nouveau spectacle qu’on nous vendait depuis des mois comme « pharaonique ». L’annonce d’une partie de la setlist quelques heures avant la première et les vidéos de son entrée sur scène, ce soir- là, avaient eu raison de moi, ma place ayant été achetée, pour la dernière du spectacle, dans les heures qui s’en suivirent. Pourtant, le doute continuait à subsister… Me voilà pourtant arrivé, le 22 juin, 6h du matin dans la file déjà importante de passionnés qui n’auraient pas manqué cette ixième date annoncée comme « ultime ».

Mylène Farmer, 57 ans et loin de les faire…

“Envisager le très grand…”

S’il est des choses à retenir d’un spectacle de Mylène Farmer, c’est bien la façon, toujours très impresionnante, dont elle apparaît sur scène. Tantôt sortie tout droit d’une des tombes d’un cimetière, tantôt sortant de la tête d’une statue ou encore immergeant d’un accélérateur de particules futuriste, la chanteuse apparaît ici des cieux, transportée par une sorte de capsule temporelle, pour poser les pieds sur une scène au décor post-apocalyptique. Dès les premières notes du spectacle, le ton est donné,  la production a mis le paquet sur des effets époustouflants, avec une scénographie qui n’aura rien à envier aux plus grands artistes, tant les tableaux vont se succéder pour n’avoir de cesser d’étonner et d’en envoyer plein les yeux. Habillée une nouvelle fois par JP Gauthier, accompagnée de ses musiciens mais aussi de 15 danseurs, elle interprétera 20 chansons qui ont su signer sa carrière, extraits connus et moins connus, set liste pensée avec une l’efficacité qu’on lui connaît. Une fois le pied au sol, Mylène Farmer enchaînera pendant deux heures ses titres les plus connus sur des scènes qui découleront du sol, une avancée de scène qui se rétractera plusieurs fois pendant le spectacle pour l’amener au plus près de ses fans, bercée par des mélodies ayant été revues pour rester dans l’air du temps, permettant aux plus anciens morceaux de trouver leur place sur cette scène futuriste et des chorégraphies complètement refondues.

« …Je vous dois ma vie. Je vous remercie pour toutes ces émotions partagées. Et vous allez me manquer aussi terriblement. »

L’émotion… S’il est là un des points essentiels de la carrière de de l’artiste, c’est bien ce côté authentique qu’elle revendique. Mylène Farmer, sur scène, c‘est du live, pas de play-back… Et tant pis si parfois celle-ci se trompe dans les paroles, lui donnant un fou-rire repris par son public ou certaines fausses notes. Authentique jusque dans les larmes, celles rencontrées à divers moment du show, notamment lors du fameux bateau « Piano voix », où elle interprétera son célèbre morceau « Ainsi soit-je », où l’émotion sera sans doute la plus forte ! Mylène Farmer ne joue pas, bien entendu, les larmes font partie du spectacle, mais pas besoin de se forcer, c’est l’émotion du moment, amenée par la chanteuse et reprise par ses fans, l’empêchant parfois d’entamer un nouveau morceau, tant ils continuent à reprendre, en choeur, le précédant.

Et puis sonne le temps de la fin… Après avoir salué le public au côté de sa troupe, l’artiste réapparaît dans un ultime plateau où elle interprétera « L’horloge », poème de Charles Baudelaire, mis en music par Laurent Bouttonnat, au début de sa carrière. Morceau qu’elle avait choisi pour commencer sa toute première tournée, il y a trente ans. Un morceau où Mylène disparaîtra comme consommée par les flammes… Un tableau des plus troublants, tant sa symbolique fredonne à l’oreille cette rumeur qui traîne depuis des mois et donnant écho au mot « ultime » utilisé pendant toute la promo du spectacle. C’est vrai que l’horloge tourne, du haut de ses 57 ans, même si elle ne les paraît absolument pas, l’artiste montre des signes non pas de vieillesse, mais juste du temps qui passe. Si celle-ci danse un peu moins qu’avant, la souplesse qui reste sienne ne pourra en effet plus durer trente nouvelles années. L’inquiétude des fans, après les dernières notes de ce final se lit sur les visages.

L’artiste disparait dans les flammes après 30 ans de scène.

Vous avez été plusieurs à me poser la question à ce sujet… Bien entendu, il est plus qu’évident que cette inquiétude m’a aussi frappé. Surtout lorsque Mylène balance des phrases du genre «  Dieu que vous allez me manquer ! » ou « Peut-être une dernière fois ensemble… » lorsqu’elle invite son public à reprendre avec elle le refrain d’une chanson. Mais Mylène, qu’on sait femme d’affaire maîtrisant parfaitement l’idée du suspens et du marketing n’a-t-elle pas toujours fait cela ? Notons qu’elle s’adressera ici une dernière fois à son public en lui disant « Au revoir » et non pas « Adieu ». Alors bien-sûr, elle a dit lors d’une interview il y a quelques années qu’elle souhaitait arrêter à temps, pour ne pas proposer l’album ou le spectacle qu’on pourrait juger comme étant « de trop ». Toutefois, 57 ans c’est jeune… L’artiste a encore de (très) belles années devant elle, lui permettant encore la possibilité de faire de jolies choses. Pour mieux répondre, je ne sais pas… je ne pense pas… je n’en ai en tout cas pas envie ! Mais Mylène le sait-elle seulement elle-même finalement ? L’avenir nous le dira… Mais s’il est des fins magnifiques, qui donnent le frisson, font monter les larmes et  nous plongent dans l’abîme profond d’un silence meurtri, c’est bien ce spectacle, dans tous les cas !

Scylla PIERCE

PS : l’info vient de tomber… Le concert sera diffusé : Le concert sera diffusé en cinéma, histoire de nous mettre l’eau à la bouche pour un album live et son film pour la fin de l’année. une séance unique qui devrait se tenir le 07 novembre 2019.

LIENS :

Conception du spectacle : Laurent Boutonnat et Mylène Farmer

Production du spectacle : Thierry Suc

Mise en scène : Laurent Boutonnat

Conception du décor : Emmanuelle Faivre

Conception des lumières : Dimitri Vassiliu

Son : Stéphane Plisson et Jérôme Devoise

Direction musicale du spectalcle : Olivier Schultheis

Création des costumes : Jean Paul Gaultier

Conception des images : Bordos Artworks / D/Labs / DK Estudio / La Maison / Ghost Cell d’Antoine Delacharlery / Prod : Autour de minuit pour M’effondre

Chorégraphies : Mylène Farmer pour Rolling Stone, Mylène Farmer et Aziz Baki pour Sans contrefaçon et Désenchantée, Parris Goebel assistée de Cullen Neale pour Pourvu qu’elles soient douces, California, L’Âme-Stram-Gram, Hip Red Hop, Aziz Baki pour Histoires de fesses, Mashup (Fuck them all / C’est dans l’air)

Coordinateurs chorégraphiques : Christophe Danchaud et Valérie Bony

Création coiffure : John Nollet

Maquillage : Carole Lasnier

Coiffure : Frédéric Birault

Coach vocal de Mylène : Karen Nimereala

Coach physique de Mylène : Hervé Lewis

Claviers : Johan Dalgaard / Vincent Bidal

Guitares : Joel Shearer / Sébastien Chouard

Basses : Jonathan Noyce

Batterie : Charles Paxson

Danseurs : Aziz Baki / Raphael Baptista / Jade Gaumet / Jocelyn Laurent / Martin Gavidia / Delphine Tournier / Mehdi Layo Lèvre / Antoine Randon / Thomas Gréaux / Kenji Matsunaga / Ellie Smith / Jamie Mason…