Grammaire aux fraises et sujets tabou.e.x.s…
Parfois, lorsque j’observe le monde tourner… Ok, je sais, j’ai déjà commencé un article de cette façon, au moins une fois ! Pourtant, rien ne change, au contraire, tout s’aggrave et m’invite à me questionner sur ce fameux monde qui m’entoure… Qui « nous » entoure, puisque loin d’être le centre de ce tout petit monde. Je m’interroge sur ces libertés qu’on nous reprend, Tentant, au passage, de nous faire culpabiliser de les avoir utilisées. Aujourd’hui, après m’être penché sur un post qui m’avait interpellé, je m’interroge sur la liberté d’expression, sur le fait de pouvoir/vouloir s’informer avant de parler et sur ces pseudos ouvertures sur le monde qu’on nous impose de tolérer, tout en nous imposant aussi le fait de fermer notre gueule !
Je n’entrerai pas dans le détail du sujet, en particulier, qui m’a fait grimper au plafond… Premièrement parce que ce n’est pas « le sujet » de cet article, deuxièmement parce que je n’ai pas envie d’ouvrir ce débat-là avec ces gens-là (ceux qui font, sous couvert d’une bonne cause, leur fond de commerce pour se faire mieux connaître derrière), troisièmement parce que je ne me nourris pas, comme je ne nourris pas ce blog, de scandales. Mais… Dans le petit train-train de la construction de ma journée, mes yeux s’égarent et finissent sur le post d’un.e abonné.e scandalisé.e par un sketch humoristique (pour certain, mais peut-être pas pour d’autres… De l’humour en somme), les comédiens singeant l’écriture inclusive il aura d’ailleurs fallu cela pour que je comprenne exactement ce qu’elle est et comment elle se construit… Comme quoi !). Et comme toute personne dotée d’un cerveau fonctionnant plus ou moins « bien », je cherche la fameuse vidéo du sketch en question pour me rendre compte de mes propres yeux de quoi il s’agit et au combien il doit être scandaleux pour provoquer une telle réaction.
Parce que c’est comme ça que j’ai été éduqué… Que c’est ça aussi qu’on m’a enseigné à l’époque : « ne pas prendre pour argent comptant ce qu’on me dit comme étant la vérité. Mais me renseigner, poser des questions, chercher, lire, analyser, interroger… M’interroger ! Afin de me faire mon propre avis et ainsi décider de ce que je juge, en toute conscience, être la vérité ! » Je lisais dans le fameux post, tout un tas de reproches, que cet humour stigmatisait, qu’il donnait raison (ce n’était pas écrit de cette façon, mais cela allait dans ce sens) aux gens agressant les personnes différentes et que c’était à cause de cet humour que les communautés minoritaires étaient victimisées. Une fois la vidéo terminée, le constat était sans appel « tout ça pour ça ?! ». En gros, je ne trouvais pas l’humour, le ton, les mots utilisés comme étant déplacés, comme je ne voyais pas là une attaque violente à une communauté… Au pire, un humour pas toujours de très bon goût, mais ces deux nuances- là vont-elles de surcroît toujours ensemble ? Je n’y mettrais pas ma tête à couper.
Mais le problème est là… Aujourd’hui, n’importe qui peut décider de prendre la parole et ainsi véhiculer le « à faire » ou le « à ne pas faire » sans qu’on lui ait demandé… Ou sans même que la personne dispose réellement du discernement nécessaire pour ce faire ! Alors, vous allez me dire, quelle différence avec avant ? A l’époque, les commères de quartier véhiculaient déjà la « sainte parole » aux coins des rues. La différence est, j’ai l’impression, que les gens ne réfléchissent plus et avalent tout ce qu’on leur met dans la bouche, sans même se poser les bonnes questions. Sur les réseaux sociaux, quand on distribue la bonne parole des minorités, où je pourrais d’ailleurs me réfugier en y revendiquant une place, on nous dit « Acceptez, tolérez, mais ne posez surtout pas de questions ! »… « C’est trop déplacé ! », « Ça, ça ne vous regarde pas ! », « Ça ne se demande pas ! »… Par exemple, quand on parle de la cause transgenre, sujet encore tabou il y a peu. J’avoue qu’il y a quelques années, lorsqu’on parlait de cela, j’avais l’impression qu’il s’agissait de cas tellement rares que personne n’en connaissait réellement. Cela fait-il de moi un gros con ? Cela fait-il de moi quelqu’un qu’on qualifierait de « mauvais » ? Non, j’étais juste mal, voire pas du tout, informé. On sait aujourd’hui les cas très nombreux, grâce (ou à cause) des réseaux sociaux… Et c’est là une très bonne chose. Comme on se réjouira du fait que ces gens puissent enfin sortir de l’ombre et exister comme ils, elles sont ! J’ai moi-même il y a quelques mois traité le sujet, en donnant parole à l’un des leurs lors d’un live. J’ai aussi, découvert qu’un ami, se trouvait être transgenre, sans que je n’ai absolument rien détecté. Le constat est pourtant là… On nous demande d’accepter, de tolérer « parce que c’est comme ça qu’il faut faire » tout en nous reprochant de nous intéresser réellement à la chose et de poser des questions. Bah, désolé, mais lorsque j’ai, il y a quelques années, parlé à mon entourage de mon homosexualité, j’ai parfois du répondre à des questions maladroites… Pas des questions « déplacées », pas des questions « malsaines », rien de tout ça. Juste des questions curieuses (quelle question ne l’est pas ?) posées par des non-initiés qui s’interrogeaient et qui ne savaient pas. Ne vaut-il pas mieux une personne qui pose une question, qu’une personne qui n’osera pas le faire et qui continuera à vivre avec les préjugés qu’une société mal informée lui aura mis dans la tête ?
Alors, je cite la cause transgenre dans le paragraphe ci-dessus, mais il y a quelques années j’aurais pu le faire avec une cause LGTB qui n’avait pas encore trouvé toutes ses extensions, quelques années avant, avec les gens à la couleur de peau différente et ainsi de suite… Ce n’est pas là qu’est le débat. Vous savez, je le dis et l’écris assez, je me bats assez pour que chacun puisse être, exister, vivre, vibrer tel qu’il, elle a envie d’être. Mais, je constate aussi qu’on sait qu’aujourd’hui, lorsqu’on on se prononce comme « n’étant pas d’accord » avec telle ou telle chose, parce qu’un abus fait que… On est catégorisé comme « raciste », « homophobe », « sexiste », « misogyne »… etc, rappelons que pour le même prix, il y a autant d’abus du côté des minorités que du côté des majorités, celles-ci ne préservant pas de la connerie. Que cela choque ou non, j’ai moi-même déjà été traité d’homophobe lorsque j’ai exprimé le fait de ne pas me reconnaître dans les profils pointés du doigt par les médias lorsqu’une gay-pride avait lieu. Bien entendu, les médias cherchent toujours les extravagances les plus folles pour illustrer leurs articles… Ceci étant, tant qu’on leur donnera à manger, ils se feront un plaisir de continuer à vendre du scandale. Je constate aussi que nous ne pouvons même plus rire d’un sujet… On ne peut absolument plus rire de rien ! On ne peut plus rire d’une différence, d’un handicap, d’une religion, d’un régime, comme on ne peut absolument plus rire de l’extrême opposé de cela. Tôt ou tard, quelqu’un se sentira « attaqué » et finira par en faire un scandale sur les réseaux sociaux. Sauf que, et cela a été prouvé dans le temps, on sait que le rire déstigmatise, dédramatise un sujet. Cela « normalise » ce fameux sujet et ouvre le champ des possibilités dans l’esprit de la population… Ce n’est pas en cachant quelque chose, en en faisant un tabou que cet effet aura lieu. Limite, le terme est fort, mais lorsqu’on stigmatise ce genre d’humour, le pointant du doigt comme « quelque chose de mal », on le censure… La censure étant l’extrême opposé de la liberté d’expression, ce bien si précieux pour lequel nos parents se sont battus pour eux, mais aussi pour nous ! Il s’agit donc là d’une forme de terrorisme… Je ne le comprends pas… Pas plus que je ne le tolère !
Comment comprendre quelque chose qui nous est totalement inconnu, si on nous interdit de poser des questions ? De tourner le cube dans tous les sens pour en observer toutes les facettes ? De voir comment il est construit, comment il est nuancé, de quelle(s) matière(s) il est constitué ? Cette attitude qui m’a toujours semblé être la bonne, ne fût-ce que pour ne pas mourir idiot, apparaît aujourd’hui comme « déplacée », « malsaine », « idiote », « curieuse ». J’en déduis donc, comme un constat malheureux, qu’on exige de nous qu’on se fonde dans la silhouette dépourvue de toute réflexion et d’exécuter sans réfléchir, sans se poser de questions, sans remettre en question. « Oui » on peut en parler… Mais pas tout le monde. Ceux qui auront gagné le droit de le faire seront ceux qui pourront en parler de façon dramatique… On en parlera en victimisant, quand on parlera des agressions, des exclusions, des discriminations. Parce que ça on peut le faire… On peut presque bien le faire d’ailleurs. L’éducation ? Non… Pas de place pour cela ! C’est dommage…
Cet article ne sera sans doute pas celui que j’aurai le mieux construit… Comme il ne sera sans doute pas celui qui aura été le mieux compris ou le plus apprécié. J’avais juste envie de poser par écrit ma déception, face à un monde qui tourne de plus en plus mal. On a appris à ma génération à ne pas être bête, à disposer d’un esprit critique, d’être capable de remettre en cause… On apprend aujourd’hui aux plus jeunes générations à ne surtout pas poser de questions. Tolérant tout ce qu’on exige qu’elle tolère. Avec pour risque qu’elle finisse par tolérer l’intolérable. Mais comment pourra-t-elle faire sans poser de questions ? Elle ne sait déjà plus le faire. !