Coup d'œil

La mémoire olfactive, l’odeurs des souvenirs…

Certaines odeurs semblent avoir enfermé des souvenirs qui vous appartiennent… Souvenirs qui referaient surface ou se feraient plus intenses une fois l’odeur « dans votre nez ». Bienvenue dans la mémoire olfactive. Un phénomène fascinant, influencé par la vision.

Notre nez serait capable de percevoir jusqu’à 1000 milliards d’odeurs différentes. Notre mémoire olfactive n’en apprend que quelques milliers et celles que nous associons à des souvenirs ont un puissant effet de réminiscence. La perception des odeurs est un phénomène fascinant… Un peu comme si certaines odeurs nous avaient marqués à vie et que le temps s’était figé à l’intérieur de ces parfums. Ainsi, il suffit parfois de simplement se promener, humant l’air pour faire surgir des émotions liées à des souvenirs olfactifs. «La perception olfactive peut affecter la perception spatio-temporelle du moment présent». Les odeurs qui viennent chatouiller notre nez lorsque nous marchons à l’extérieur ne sont jamais pures; il s’agit toujours de subtils mélanges volatils d’où émanent certaines notes prédominantes. 

Pour ma part, certains souvenirs sont profondément ancrés dans les odeurs… Mon grand-père qui était profondément pieu dans sa religion, s’occupait d’entretenir le temple où il avait pris ses habitudes du dimanche. Pendant les vacances, il avait pris l’habitude de m’emmener avec lui. Ainsi, je me souviens de ces moments où je me plaisais à jouer, courir, me cacher dans cet endroit que je ne connaissais pas. Je m’en souviens, mais depuis peu, car ce souvenir avait été oublié, jusqu’à il y a un an, lorsque j’ai découvert l’huile essentielle « Encens Oliban » dont l’odeur a complément ravivé ce souvenir. Jusqu’alors, le souvenir semblait avoir été enfermé dans un coin de ma mémoire, jusqu’à être partiellement éteint.

La vision a, en effet,  une emprise importante sur le processus olfactif. Nous apprenons dès notre naissance à saisir le monde par la vue. Nous tentons donc de «voir» ce que notre nez perçoit. Qui n’a jamais senti une odeur de café ou de pain frais avant d’en chercher la source à proximité? C’est fréquemment la liaison visuelle qui permet de donner un sceau d’authenticité à ce que l’on sent, car les odeurs sont liées à un système complexe de représentations mentales dans lequel chacune, esquissée par une collection d’expériences vécues, a un certain poids narratif. Notre perception visuelle peut altérer notre perception olfactive jusqu’à nous faire croire qu’une odeur n’existe pas si on n’en perçoit pas rapidement la source émettrice. Une odeur perçue provoque en premier lieu une émotion pré-conceptuelle, alors que ce qui est perçu visuellement entraîne immédiatement une analyse cognitive.

Contrairement à la vision, dont les voies transitent par le néo-cortex avant d’atteindre l’amygdale – une structure cérébrale qui irrigue les systèmes de mémorisation quand une émotion intervient –,  notre système olfactif a une connexion directe avec cette dernière. Par conséquent, une odeur perçue provoque en premier lieu une émotion pré-conceptuelle, alors que ce qui est perçu visuellement entraîne immédiatement une analyse cognitive. Cela expliquerait en partie pourquoi il n’y a pas véritablement de vocabulaire pour décrire les odeurs. Les parfumeurs et les œnologues ont développé un langage, mais si vous et moi voulons décrire une odeur perçue dans la rue, nous devons souvent référer à la source émettrice ou la mettre en contexte. La perception des odeurs devient alors un processus narratif lié à une histoire, une émotion, une sensation.

Et vous ? Quels souvenirs de votre enfance ou de votre vie ont été enfermés et dans quelles odeurs ?

Scylla…