Lorsque vous êtes chef d’entreprise au Luxembourg, il est parfois bien difficile de nager dans les eaux de l’entreprenariat. Non pas par peur d’y rencontrer des requins, ou de ne pas savoir nager, mais tout simplement parce qu’il faut s’avoir s’habiller d’un costume qui n’a pour seul intérêt que l’éclat du « chic » qu’on veut bien lui prêter…

A la base de ma réflexion, un échange d’e-mail, il y a quelques jours, avec une journaliste qui souhaitait m’inviter à une interview. Jusque là, rien de très particulier, notre deuxième événement de l’année arrive à grands pas. Toutefois, j’envisage toujours cet exercice avec un certain recul… Il me met profondément mal à l’aise, car il me dis qu’il va falloir se justifier ! Parce que c’est ça aussi, cet exercice tant redouté, celui de presque défendre son projet, alors que vous n’êtes absolument pas entrain de faire d’erreur. J’échange donc avec mon interlocutrice quand soudain j’entends dans la conversation « Chef d’entreprise atypique »… Mais atypique en quoi ?

Si on se réfère à mes techniques de management, oui, il est évident qu’on surfe sur quelque chose de moderne, de volontairement humain, mais je n’ai absolument rien inventé. Au contraire, oserais-je dire que je ne fais que descendre d’un piédestal pas très confortable, pour surfer sur la tendance de l’écoute des gens qui nous entourent et qui construisent avec nous ? Il est vrai que perché là tout en haut, on ne risque pas d’entendre ce que nous susurrent ceux qui nous entourent et qui construisent avec nous. Alors « atypique » en quoi ? Pour cette volonté que de bousculer les codes du monde de l’événementiel ? Là encore, rien de bien particulier… Je ne fais que partir du principe que mon métier est d’envisager, d’anticiper les envies, le comportement de mon public, pour lui apporter une fête qu’il savourera et qui le fidélisera. Une façon de penser qui devrait être inscrite dans l’ADN de toute personne travaillant dans l’événementiel, que cette personne soit « patron » ou pas. Donc « Atypique » vous disiez ? Si on se réfère aux apparences, peut-être… Il est vrai que je me paye la liberté que d’être qui j’ai envie d’être… Parfois avec les cheveux roses… Parfois avec du vernis noir sur les ongles… La liberté quoi ! Mais là encore, on est en 2022 les gars ! Si l’efficacité d’un entrepreneur se jaugeait à son apparence, le monde tournerait sans doute un peu moins carré. Quel intérêt donc à ce cocktail « explosif », si ce n’est celui de donner un caractère lui-même « atypique » pour ne pas dire « plus vendeur » à un article qui ne parlerait, finalement, que d’un mec « comme tout le monde ».

C’est toutefois bien révélateur du « milieu » dans lequel il m’est demandé d’évoluer… Je me souviens de cette phrase que j’avais entendu en 2017 lorsque j’ai créé The Storm Events, qui m’a été glissée à l’oreille sans que je je ne l’ai réellement comprise : « Maintenant, tu vas devoir sortir aux bons endroits et te faire voir… Tu es patron ». Le succès d’une entreprise ne se résume donc qu’à cela ? La (pseudo) popularité de son leader ? Parce que voilà, à l’image du réseaux social où tout le monde (excusez-moi du terme) « léche les c*uilles » de tout le monde (vous avez vu, pour une fois, je m’auto-censurerai presque), lorsqu’on est chef d’entreprise, il y a un certain costume à porter… Un langage à aborder… Un style à adopter… Voguer dans des cieux qui semblent ne côtoyer que les dieux. Histoire de bien interpréter son rôle, de rentrer dans le moule initiale et donc, ainsi, d’acquérir une certaine crédibilité. Par exemple, depuis peu (ne me demandez pas quand, j’ai moi-même pas compris) il ne faut plus dire « j’organise un cocktail pour l’anniversaire de mon entreprise », aujourd’hui, pour faire « hype » il faut dire « j’organise un Walking Diner »… Un quoi ? Un diner où on va marcher ? Non, non… Une sorte de réunion, où les gens vont se mêler les uns aux autres, en buvant un verre et en dégustant quelques acouskis… Pardon… Quelques « Finger foods ». En gros un cocktail quoi… Le truc vieux comme la nuit des temps, sans doute tellement vieux qu’il était plus qu’indispensable de lui ravaler la façade ! Why ?

Lorsque le « Chef d’entreprise » (mettons y tout de même les majuscule, ne fût-ce que pour la forme), je vais me baigner dans ces eaux là, je suis confronté à des titres, à des termes que je ne comprends pas… C’est quoi un « Head of Marketing Manager Superior » ? Un « Key sector Manager » ? Ou encore un « Director Global Employer Services » ??? Sans compter le nombre incalculables de CEO, CFO, CAO, CMO, CXYZ qui, certes, font très professionnels, mais que absolument personne ne peut expliquer en deux mots. Et moi, aux milieu de tout ce beau petit monde, je suis planté là, éternel paumé aux apparences bien trompeuses, avec cette sinistre impression d’avoir les yeux rivés sur moi, l’univers en orbite tout autour n’attendant que ce moment où je vais finir par me vautrer ». Désolé les gars, j’ai grandis dans un milieu ouvrier… Mes parents n’ont jamais porté de titres ou de vêtements de marques et j’en suis heureux. Ca m’a poussé à me donner, à m’acharner parfois et à me construire souvent seul. Cela me pousse à ne pas oublier qui je suis, même si parfois de mon statut d’être humain, il m’arrive aussi de décoller.

Alors comment conclure un tel article ? Simplement en en rigolant comme d’habitude… En transformant chacune de ces scènes, dans mon esprit, en scénario qui verrait évoluer tout un tas de coqs dans une toute petite bassecour, tous entrain de se mesurer les uns aux autres pour définir d’un « commun accord » qui sera le plus beau et qui aura la plus grosse… Crête ! Ne devrions-nous pas tout simplement nous rappeler que nous ne sommes certainement pas entrain de sauver des vies ? Gage à moi d’avoir cette chance que de pouvoir disposer dans mon équipe d’un très efficace Directeur Commercial, qui rentre beaucoup plus facilement dans les cases et qui a cette volonté d’exceller en la matière de façon beaucoup moins rebelle que moi ! Ce mec est un saint… Je devrai l’augmenter !!!!!

Scylla…