Noir… A mieux y réfléchir ?
Donc… Aujourd’hui, il semblerait de bon ton d’afficher un carré noir, sur les réseaux sociaux, pour soutenir « la cause ». Ok… Et maintenant ?
C’était le hashtag à succès de ce mardi, le fameux #blackouttuesday ! Je parle de hashtag à succès, parce que certains n’auront pas compris… Mais l’auront tout de même affiché ! Faire comme tout le monde, c’est bien, c’est tendance et ça ne peut finalement pas faire de mal ! Qui plus est sur des médias où la popularité et les faux semblants sont de mise. « Insragram devient le levier contre le racisme » nous écrit-on dans les grands titres… Sur les 24 premières heures, #BlackOutTuesday comptabilisera 2,5 fois plus de messages que ce qu’avait généré #MeToo à l’époque ! Tiens au fait… #MeToo, plus personne n’en parle ?
Et vous l’aurez compris, c’est bien là que le bât blesse… De nos jours, on ne fait pas la révolution, on ne soutient plus une cause, on ne tente plus de défendre. Tout cela n’est plus assez tendance ! De nos jours, on « milite » le cul assis bien confortablement sur son canapé, blotti entre deux coussins achetés sur Amazon, les yeux rivés sur la dernière déco achetée sur Wish pour 1 euro presque 25 cents. Pour celles et ceux qui vivraient sous une bulle parallèle à ce monde, et je sais qu’il en est des multitudes (comme je les envie parfois…), en réaction aux mouvements de rue qui font actuellement rage un peu partout dans le monde suite aux émeutes de Minéapolis, l’industrie musicale a donc lancé le concept du “Blackout Tuesday”. Des maisons de disque ont fermé temporairement leurs bureaux tandis que des sociétés comme Spotify ont marqué plusieurs minutes de silence, en signe d’indignation suite à la mort de l’Afro-Américain George Floyd lors d’une arrestation policière. Plusieurs artistes ont, en parallèle, publié des messages accompagnés d’une image entièrement noire sur les réseaux sociaux. Leur idée est d’encourager le plus de personnes à s’indigner ainsi de la mort de George Floyd et du comportement « outrageant » des autorités américaines en inondant Twitter, Facebook ou encore Instagram de « ténèbres contestataires ».

Pendant une journée donc, le monde s’est indigné, semant tout le long de ses heures le hashtag éponyme et ses images noires. Enfin… Quand je dis le monde s’est « indigné », c’est principalement sur Instagram que celui-ci a déversé l’ombre de sa contestation, il n’est pas descendu dans la rue, il n’a pas taggué des murs, il n’a mis le feu nulle-part si ce n’est aux like et aux follows de leurs comptes. Il ne faut pas croire non plus que ce monde- là a révolutionné quelque chose… Pas en l’espace de moins de 24 heures… D’ailleurs, notre monde est-il réellement encore capable de se révolter ? Autrement que pour le style, je veux dire. Parce que voilà, aujourd’hui, quand on se révolte, ce n’est jamais sans but… Ca ne l’était pas non plus à l’époque de nos grand-parents, je vous rassure. Sauf qu’eux, de leur temps, l’hyperconnection au reste de l’enclos n’existant pas, lorsqu’on voulait se faire entendre, il fallait descendre dans la rue, en masse et bousculer ce qu’il y avait à bousculer. En 2020, si les hashtag ont remplacé les banderoles aux slogans militants, il est aussi bon de rappeler qu’ils ont aussi un certain « mérite » d’être « sous contrôle » à tout instant. Le fameux #BlackOutTuesday lancé au bon moment pour diviser la montée du #BlackLivesMatter, lancé quelques jours plus tôt, parasitant l’efficacité de ce premier et le suivi de son actualité au passage. D’ailleurs, c’est très simple… Si je devais en venir à gouverner le monde, un jour ( Dieu s’il existe nous préserve de cette idée) et que je devais préserver mon tout petit monde d’une énorme météorite qui venait droit à foncer vers nous, j’enverrais, tant qu’il est encore temps, une grosse fusée foncer tout droit vers celui-ci afin de le briser en deux et ainsi préserver ce tout petit monde qui est le mien. A méditer…
Aujourd’hui donc, deux clans s’affrontent… Enfin, ils ne s’affrontent pas vraiment puisque l’un soutient l’autre, nous dit-on. L’un d’eux amène les gens à descendre dans la rue, déferlant sa colère et militant contre le pouvoir « oppressif ». L’autre ne descend pas dans la rue, n’en ressentant apparemment pas tellement le besoin… Vous remarquerez à cet instant que l’oppression ne semble pas aussi brutale pour tout le monde. « Mais quand même », on soutient parce que voilà… Mais parce que voilà quoi, en fait ? Je ne sais pas mais, chacun a son avis et reste (pour l’instant encore, en tout cas) libre d’en avoir un… Il ne peut pas toujours l’afficher, l’écrire, encore moins le crier (pour ça, par contre, c’est déjà trop tard). Mais lorsque tu as un avis, c’est blanc ou noir… Tu descends dans la rue parce que tu en as tellement marre que tu veux tout détruire, ou tu restes chez toi. Chacun est libre de choisir ce qu’il fait, et personne ne t’en voudra de prendre « ta » décision. Le concept du « rester chez soi et soutenir via Instagram » c’est un peu comme participer à un festival de musique en buvant une limonade depuis son canapé. T’as rien compris…

En réalité… Certains d’entre vous l’auront compris, particulièrement cette putain d’année, mais notre monde ne tourne plus rond. Il est largué… Complètement ! Si les grandes étapes révolutionnaires ont vu nos ancêtres se battre à corps et à cris, pendant parfois des mois, voir des années, pour obtenir le changement auxquel ils aspiraient tant, notamment pour notre avenir à nous, on se dit que fort heureusement ils se sont battus assez pour obtenir une avancée certaine. Si ces luttes devaient se mener aujourd’hui, elles se mèneraient sur Facebook, Instagram, Twitter… Ou même peut-être sur Tik Tok, Snapchat ou Pinterest. Et pour lancer la « nouvelle » révolution, il suffirait d’ailleurs sans doute de poster une vidéo, mieux une simple photo, au sujet « tendance » et surtout « vendeur » tels les grands titres des tabloïdes. Et si celle-ci devait se mener de nos jours, le sujet le plus « vendeur » dans le genre serait celui d’un Policier en action… Quelle action ? On s’en fout… Dans tous les cas, l’image serait manipulée. Il est par contre à noter que ces tendances- là sont assez instables et peuvent très vite changer de camp, je m’explique : Aujourd’hui, la Police c’est vendeur parce que c’est « les grands méchants ». Hier c’était les chinois avec le Covid-19. Mais attention, si un attentat venait à éclater demain, on ressortirait nos belles images noires pour y placer le solvant « je suis machin » et on se remettrait à vénérer la Police et les uniformes qui soudain sont redevenus les « gentils » qui nous protègent. Ceci étant, rassurez-vous… Quoi qu’il se passe, quoi qu’on dise ou que l’on fasse, il y aura toujours des gens pour descendre dans la rue, tout péter pour se faire entendre… Et au passage faire leur shopping dans les boutiques dont ils auront détruit les vitrines !
Pour mal part, je n’ai pas affiché d’image noire… Je pense, comme toute personne censée, qu’il est stupide de faire une distinction entre les populations pour l’une ou l’autre couleur, pour son orientation sexuelle, qu’il soit homme, femme, animal, éponge assoiffé ou d’un tout autre genre. J’aime le noir, c’est ma couleur préférée… Mais je ne l’affiche pas. Lorsque j’ai envie de gueuler ma frustration, ma colère, ma tristesse ou ma joie, j’écris… Ou je gueule. Pour vous, cela ne sert peut-être à rien, mais à l’instar d’autres fortes personnalités, dans ce cas, je crée quelque chose, je véhicule un message fort. Publier une image sans trop savoir pourquoi ne changera pas le monde. Je n’ai d’ailleurs plus vraiment d’espoir pour celui-ci…
Dommage.
Scylla…

LIENS :
CRÉDIT PHOTO
Cover : Adrien OLICHON
1° : Montage photo
2° : Koshu KUNII
3° : Clark TIBBS