Qu’est-ce que je fous là…
Cette question, dans le documentaire retraçant le parcours qui est le sien depuis quelques années, diffusé depuis le 26 novembre sur la plateforme Netflix, Angèle se la pose souvent, en toute humilité. Un concentré de moments découpés dans sa vie de tous les jours, qui lèvent le voile sur les moments marquants de son histoire, de sa vie, quitte à déranger. J’ai maté le truc et je vous en parle…
Angèle, c’est qui ? Pour moi, c’était ces chansons que j’ai écoutées puis fredonnées comme « Balance ton quoi », « Ta reine » ou encore « Tout oublier » qu’elle interprète aux côtés de son frère Roméo Elvis, dans l’album « Brol », sorti en 2018. Pour la plupart, Angèle c’est ça… Mais ça n’était pas ce que le documentaire diffusé depuis quelques jours nous laisse entrapercevoir d’une vie réelle, faite sans doute de non-hasard, mais aussi de beaucoup d’humanité. Et cette phrase « Qu’est-ce que je fous là ? » elle va se la poser souvent et nous le raconte dans ce documentaire. Une sortie sans doute un peu stratégique, puisqu’en amont de son deuxième album, un nouvel opus qu’elle a pris le temps de composer pendant le confinement (ne me demandez plus lequel, je m’y suis perdu). Quoi qu’il en soit, on lui pardonnera cette option marketing qui passe plutôt facilement, tant le récit est intact et humain, faisant fi des artifices, lui préférant la sincérité, quitte à laisser apercevoir la douleur, la fragilité et la blessure.
Parce qu’être une ” star ” comme le dit si bien sa grand-mère, dans le reportage, aujourd’hui, c’est savoir créer des tubes tout en osant se montrer sous sa véritable nature… Loin des belles réalités illusoires des réseaux et du nouveau marketing du pouvoir, où n’importe qui peut devenir en faisant n’importe quoi. Un conte réalisé par Brice VDH et Sébastien Rensonnet qui, pendant près d’une heure trente, va nous faire le récit d’une vie à travers des images d’archives, de vidéos, d’images du quotidien et de stories postées par-ci par-là. La chanteuse se replonge dans ses cahiers intimes qu’elle tient depuis son enfance, avec une sincérité frappante. Allant des rires aux larmes, en passant par les surprises, les instants de gloire ou de désespoir, c’est ici quelque chose d’unique qui nous est raconté… Unique car raconté avec la volonté de ne pas cacher la faille. On apprendra ainsi que sa première scène était une première partie de l’artiste rappeur Damso, où elle s’est littéralement faite huer et insulter. On découvrira le revers de la médaille aussi lorsque, après le succès du très revendicatif « Balance ton quoi », dont Angèle avoue elle-même avoir perdu le contrôle, elle bascule dans le drame quand son frère est accusé d’agression sexuelle. Ou encore lorsque sa bisexualité est annoncée en toute impudeur à la télé, sans aucun respect, dans une émission poubelle comme on en fait trop depuis un moment.
Un documentaire laissant aussi sa place à la difficulté d’être la fille de… Ou la sœur de… Dès sa plus tendre enfance, alors que son père, un chanteur belge, a de grandes ambitions pour elle, alors que sa fille aime le piano, mais ne compte pas en faire son métier. On s’adressait à elle comme étant la fille de… Aujourd’hui, ce sont ses propres parents qui témoignent du troublant revirement de situation du fait désormais d’eux les « parents de… », comprenant aujourd’hui toute la difficulté de la chose. Les fans qui suivent l’artiste sur les réseaux connaissent le cocon familial important, tout autant que l’amical ou l’animal, la chanteuse étant très attentive à cette cause. On mesurera aujourd’hui toute l’ampleur et l’importance de ces liens.
Si humanité rime souvent avec fragilité, les joies et les vertiges de la célébrité, tout comme les instants de doutes seront eux aussi au rendez-vous, prouvant que c’est bien le talent de l’artiste qui l’a hissée là où elle en est aujourd’hui. Pourtant, elle balance la sauce dès les premières secondes de voix off, Angèle racontera elle-même sa vie, parce que personne d’autre qu’elle ne pourra aussi bien la raconter. Il semble évident que le contrôle et la maîtrise parfaite du récit lui appartiennent, pour ne pas basculer dans les déboires qu’elle a racontés en acceptant de se confier, avec beaucoup de naïveté au magazine Playboy. Pour la peine, on comprendra parfaitement et les plaies laissées ouvertes, ne pourront que l’en excuser.
Un documentaire à voir sans tarder, même lorsqu’on n’est pas fan, parce que l’humanité en vaut tout simplement la peine. Une belle histoire, comme on les écrit en 2021, faisant le reflet d’une vie qui n’est pas toute rose. En attendant un deuxième album qu’elle annonce moins « populaire » mais sans doute plus « vrai ».